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lpa | 12 avril 2025 | 1562 vues

Sud-Kivu : la visite du ministre de la Défense à Uvira crée des tensions sociales

Uvira, Sud-Kivu – Le passage du vice-premier ministre et ministre de la Défense, Guy Kabombo Mwadiamvita, suscite des réactions controversées et des tensions inévitables au sein des couches sociales dans la zone. Ce voyage, qui aurait dû unir la communauté face aux menaces posées par les rebelles de l’AFC-M23, révèle au contraire des fractures au sein de la société et détourne l’attention des acteurs.

Lors de sa visite, un montant de 50 000 $ a été distribué à cinq groupes représentant la société civile, les Wazalendo, la jeunesse, les sages et les femmes leaders. Cette donation, effectuée en public, conduit à des frustrations et des ressentiments, les bénéficiaires ne cachant pas leur mécontentement quant à la façon dont l'argent a été distribué après le départ du ministre. Certains observateurs estiment que le ministre a commis une erreur en procédant ainsi dans une région déjà soumise aux tensions des groupes armés.

Sur les réseaux sociaux et au sein de la société, les messages de colère et d'indignation se multiplient. Des lettres de mécontentement sont adressées par des membres de groupes qui n'ont pas reçu leur part, créant ainsi un climat de division au lieu de solidarité face à l'ennemi commun.

Une manipulation politicienne ?

Les experts s'interrogent sur l'impact de cet argent des contribuables distribué de manière irresponsable par le vice-premier ministre et ministre de la Défense. Mapenzi Manyebwa, expert en développement rural et coordinateur de la Dynamique de la société civile pour le développement durable (DSCDD), analyse la situation avec une dose d'inquiétude. « Nous sommes très inquiets de la déchirure qui gagne du terrain dans les structures sociales après la distribution de l'argent laissé par le ministre de la Défense à Uvira », déclare-t-il à La Presse africaine.

« Le ministre de la Défense est arrivé ici, et on croyait qu’il vient avec les nécessaires pour renforcer ceux qui sont au front, mais rien ; que des discours populistes. On dirait qu’il a joué le jeu de l’ennemi », témoigne un habitant d’Uvira, sous réserve d’anonymat.

« Aucun débat ouvert et objectif pour la question sécuritaire à l'arrivée du VPM et ministre de la Défense à Uvira avec les parties prenantes en matière sécuritaire, aucun cahier des charges pour les Wazalendo, les femmes leaders, les sociétés civiles et autres couches sociales. Nous restons dans la distraction des hommes politiques congolais, sans prendre conscience de nos vrais défis au Sud-Kivu », ajoute monsieur Mapenzi Manyebwa.

Selon lui, l'argent devrait plutôt être réorienté vers des efforts de soutien aux Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) et aux Wazalendo, qui livrent bataille sur le terrain.

Manyebwa souligne que la véritable menace réside dans la fragmentation des groupes qui devraient travailler ensemble. Au lieu de favoriser l'unité, cette distribution a attisé les tensions entre les différentes couches de la population. « Notre constat est sombre sur les comportements des plusieurs leaders à Uvira. Nous avons certaines pathologies que nous continuons à manifester, notamment la cupidité, l'égoïsme et le manque de patriotisme, la haine viscérale des uns contre les autres, le manque d'unité de coordination entre les structures des jeunes, les sociétés civiles, les mouvements citoyens, etc. », ajoute-t-il.

Appels à l’action

Bani Bibenga Georges, expert consultant en cohésion sociale dans la ville d’Uvira, exprime également ses préoccupations lors d’un entretien avec La Presse africaine : « Au lieu que ça soit une initiative qui contribue à l'amélioration de la sécurité et atténue la misère dans laquelle vit la population d'Uvira en ce moment de la crise sécuritaire et humanitaire, cet argent est aujourd'hui à la base des tensions et des conflits entre certaines couches de la population. »

Au moment où la ville a besoin de l'unité de toute sa population pour faire face à l'ennemi et aux différents défis économiques, sociaux et sécuritaires, le VPM et ministre de la Défense vient d'allumer le feu et d'affaiblir cette unité entre la population.

L'impact de cet argent est très négatif et peut être compris comme une manipulation politicienne de la population d'Uvira par l'autorité nationale pour un but non connu. Tels sont les points de vue de plus d’une personne.

Vers une solution durable

Face à cette situation délicate, nos sources pensent qu’au lieu d’une simple réunion dans une salle, la visite du VPM et ministre de la défense devrait être fait dans la plaine de la Ruzizi pour renforcer la morale des combattants FARDC et Wazalendo, évaluer les conditions et identifier leurs besoins réels sur le terrain ; renforcer les infrastructures de base en construisant des micro-barrages pour l’électricité et en améliorant l’accès à l’eau potable, ce qui réduit les risques pour les femmes cherchant de l'eau la nuit dans un contexte d'insécurité et enfin, soutenir les familles des militaires et vaillants Wazalendo, tombés au combat pour montrer que l'État s'engage à ses côtés dans cette lutte, fait savoir monsieur Bani Bibenga George.

De sa part, Mapenzi Manyebwa appelle les acteurs de la société civile, les structures des jeunes, les mouvements citoyens avertis et d'autres acteurs politiques et économiques de bonne volonté à lutter contre le dysfonctionnement du gouvernement congolais à tous les niveaux, à multiplier des plaidoiries et des lobbyings pour la refondation de l'État congolais et à sensibiliser la population civile sur le vrai rôle de l'État congolais et des organisations syndicales et de la société civile en RDC et à Uvira en particulier.

Selon lui, « il est temps d'agir contre le dysfonctionnement du gouvernement et de mutualiser les efforts pour garantir un avenir meilleur et sécurisé pour la population du Sud-Kivu ».

 

Rédaction LA PRESSEAFRICAINE



0 Commentaire :

  1. Je crois que vous comprenez ce que les autres avaient déjà compris. On cherche les traîtres ailleurs, mais ils sont dans les institutions agissant sous l'ombre de leur incompétence.



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